En marge de la réforme des retraites, les mobilisations sociales sont omniprésentes en France. Parmi celles-ci, la mobilisation autour de la A69 fait référence à des mobilisations habituelles que l’on appelle les grands projets dits « inutiles ». Autour de ces derniers, plusieurs mobilisations  ont déjà eu lieu voir sont encore en cours à l’instar des méga-bassines de Sainte-Soline. S’agit-il du résultat d’une défiance envers le pouvoir ou d’une lutte écologiste contre un nouveau « grand projet inutile » ?

Les enseignements

La réponse est clairement la deuxième option puisque :

• La manifestation physique permet de mettre la lumière sur le sujet avec de nombreux politiques et médias qui créent une volumétrie unique sur la période analysée.
• Si de nombreuses manifestations sociales ont lieu contre le gouvernement, les thématiques abordées sont clairement en rapport avec l’écologisme et non les agendas connexes. Il s’agit donc vraiment d’une mobilisation typique telle qu’on peut l’observer contre les grands projets inutiles.
• Dans cette lutte Atosca, le concessionnaire est étonnement peu vocal et visible, laissant les élus locaux prendre la parole.
• Si les acteurs nationaux et franciliens sont très présents, une base locale existe et est particulièrement active contre le projet. Cette base est très ancrée politiquement autour de LFI et EELV. Environ 70 % des acteurs sont spécifiques au projet de l’A69 par rapport aux autres grands projets inutiles.

La manifestation en présentiel reste un format gagnant

La manifestation est un des formats les plus utilisés pour protester contre les grands projets inutiles. Et à raison : le pic d’activité est relativement clair. Toute l’attention médiatique et social media nait de cette manifestation, et celle-ci permet d’atteindre un pic auprès des politiques.

Afin de comparer les thématiques les plus évoquées, les mentions ont été divisées en sous-sujets.

De ces sous-sujets ressortent plusieurs observations :

• La journée de mobilisation a donné lieu à la moitié des prises de parole. La construction du mur d’agglo sur la RN 126 lors de cette journée a été particulièrement évoquée et visible.
• S’il y a des contestations à l’égard du gouvernement ou de ses membres, le nombre de mentions est relativement faible (4%). Outre le Président Macron, les utilisateurs ont le plus évoqué le ministre de l’Intérieur, G. Darmanin. Sa politique menée vis-à-vis des mobilisations récentes, à Sainte-Soline notamment, et ses propos (« éco-terroristes ») ont été vivement critiqués et dénoncés. D’ailleurs, si la réforme des retraites reste au cœur de l’actualité, elle est peu évoquée dans le cadre de l’A69.
•  L’écologie est le sujet clé, au cœur de la mobilisation. Les mentions traitent des conséquences sur la forêt, la biodiversité et l’agriculture. L’artificialisation des sols est aussi évoquée ainsi que l’urgence climatique plus généralement. La destruction des terres et des forêts mais aussi plus spécifiquement de platanes centenaires a été régulièrement évoqué. Le modèle tout-voiture est remis en question alors que la question du désenclavement du territoire est avancée par plusieurs élus locaux favorables au projet. Bien qu’ils soient présents, les arguments plus socio-économiques (ex. prix du péage) apparaissent comme plus secondaires.

Une base locale élargie par un socle de militants nationaux

Et pour cause, cela donne un zoom national sur la situation avec des acteurs politiques ayant une stature nationale et provenant majoritairement de LFI et EELV

Tout d’un coup, les médias nationaux s’y penchent avec une base, certes locales (forte présence de Toulouse et de l’Occitanie) mais surtout parisiennes avec des afflux de militants provenant d’Ile-de-France. ( Ce qui est généralement décrié par les locaux)

Les acteurs les plus actifs sur Twitter sont cependant des locaux, de Toulouse majoritairement, alors qu’ils sont directement touchés par la question. Des critiques apparaissent cependant à l’égard de la prise de parole de Sandrine Rousseau (EELV) qui a qualifié le projet « d’imbécile » et « d’un autre temps ». Ses propos ont été repris et vivement critiqués par des utilisateurs. Marc Baudriller (Directeur adjoint de la rédaction de Boulevard Voltaire) sur sa légitimité à s’exprimer sur cet enjeu local. Les tweets de ses derniers ont cependant une faible visibilité alors qu’à contrario des propos de l’élue qui ont été repris par les médias (dont BFM et France Info).

Alors qu’elle qualifiait l’A69 de « décision absurde » et proposait d’abandonner les projets autoroutiers comme aux Pays-Bas, l’ancienne députée européenne Corinne Lepage a également été sous le feu des critiques par des utilisateurs, mais aussi des personnalités politiques locales, comme Bernard Carayon, maire de Lavaur. En comparaison avec son tweet, la visibilité des tweets de ses détracteurs est plus limitée.

Les critiques sur les militants nationaux sont cependant démentis par plusieurs éléments. Tout d’abord, nous retrouvons plusieurs acteurs associatifs, dont Axe vert de La Ramée ou encore Extinction Rébellion Toulouse.

Ensuite, s’il y a une base semblable entre l’A69 et les autres grands projets jugés inutiles, elle n’est que de 30 % semblables et seulement 11,5 % par rapport à la totalité des propositions :

Cette base semblable est associative et assez influente sur ces mobilisations :

*Définition d’un « grand projet inutile »

Projet d’infrastructure ou d’aménagement jugé non-nécessaire du fait de ses conséquences environnementales, socio-économiques et/ou humaines. L’absence de concertation locale et le décalage entre ces grands projets et les challenges environnementaux, sociaux et économiques actuels sont souvent contestés.

Autres projets analysés : *Projets analysés : Méga-bassines de Sainte-Soline, Stocamine, Notre-Dame-des-Landes, Barrage de Sivens, GCO de Strasbourg, Ligne 18 du Grand Paris Express, Ligne 17 du Grand Paris Express, Europacity, Tour Triangle de Paris, Terminal 4 de Roissy, Projet Cigéo, Ligne Lyon-Turin, Center Parcs de Roybon, éoliennes en mer d’Oléron, Montagne d’Or